Sa rafale
En 2020, Maxime fait un séjour en hôpital psychiatrique. Très vite, des rencontres avec d’autres patient.e.s adviennent, douces, surprenantes. À l’issue de ce séjour, Maxime propose à son ami Guillaume, peintre, et schizophrène, de convoquer leurs figures. L’un raconte, l’autre peint.
On peut redouter qu’un film, surtout s’il s’agit d’un premier et qu’il est du genre personnel avec voix off, s’ouvre avec des images en super 8. C’est très avantageux, ça fait cinéma, ça vous fabrique de la mélancolie en un claquement de doigts. Le film de Maxime Garault lève très vite ce doute, quand ce qui n’était qu’un préambule laisse place au film et à une idée plus haute du cinéma. C’est d’ailleurs ce que dit ce véritable début, avec un plan qu’on voit se fabriquer de l’intérieur. L’unique personnage du film, qui est sur le point d’être filmé, se lève pour fermer un store, ouvrir une fenêtre, régler quelques trucs puis demander au réalisateur (mais en regardant la caméra) ce que ça donne, comme lumière : bref, le personnage fabrique le plan avec le cinéaste, et c’est un genre de profession de foi, une façon de se montrer comme des apprentis travaillant à faire du cinéma – ce qui vaut toujours mieux que faire cinéma. Cela n’empêche pas que, devant Sa rafale, on pense plus d’une fois à tel film ou tel cinéaste du temps jadis (les années 70, beaucoup), dans le même genre humble, artisanal et esthète. À cause, par exemple, d’une manière de faire vivre par des silences très riches (souvent juste quelques oiseaux lointains, à travers une fenêtre ouverte hors champ), des cadres minutieusement composés : il suffit qu’un plan montre un bout de plage depuis un balcon et on est parachuté chez Duras ou bien Rohmer (sans compter la typographie des cartons). Il y a aussi une raison plus directe : derrière cette collaboration cinéaste/personnage, on reconnaîtra une discrète et noble tradition (parmi d’autres : Shirley Clarke). Ce qu’il y a de très beau ici, c’est que ce voeu d’humilité collaborative est suivi au point que chacun, pour donner vie au film, est tenu de faire deux choses : tandis qu’il réalise, le réalisateur doit aussi raconter ; tandis qu’il fait le personnage, le personnage peint (ce que le réalisateur raconte) pour donner des images au film. Le travail paye : Sa rafale fait du cinéma avec un talent devenu rare.
Jérôme Momcilovic

Maxime Garault
Maxime Garault a étudié la littérature, puis le montage à la Fémis. Sa rafale est sa première réalisation documentaire.
Salaud Morisset
Salaud Morisset
Maxime Garault
Tristan Pontecaille
Maxime Garault
Salaud Morisset / festival@salaudmorisset.com