#01 Sélection internationale
Landscapes of Resistance
Marta Popivoda
Paysages résistants plonge dans les souvenirs d’une combattante antifasciste, Sonja (97 ans), une des premières femmes Partisane de Yougoslavie, qui fut également une des chefs de file du mouvement de Résistance au camp d’Auschwitz-Birkenau. Son histoire voyage à travers le temps et s’incarne dans une nouvelle génération antifasciste, entretenant l’idée qu’il est toujours possible de penser et de pratiquer la résistance.
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Si Landscapes of Resistance nous fait rencontrer et aimer Sonja, qui fit partie du mouvement des Partisans de Serbie et témoigne ici de son parcours extraordinaire, sa mort est annoncée dans le film sans dramatisme aucun. Ce parti pris est révélateur de la démarche de Marta Popivoda : raconter une histoire du vingtième siècle, mais en gardant les yeux ouverts sur le présent. Dépeindre un être dans toute sa singularité, pour mieux le faire résonner en nous. Il s’agit de tirer une inspiration, au sens le plus fort du terme, de la façon dont Sonja a, très tôt, commencé à lire des ouvrages « progressifs », avant de s’engager contre les Nazis sans jamais perdre courage, même à Auschwitz. La réalisatrice construit un écrin pour le récit précieux de la vieille dame. Le rythme de son montage s’aligne sur le débit doux et lent de sa voix : les images se fondent les unes dans les autres au gré de magnifiques fondus enchaînés. Ces plans au présent font s’entrecroiser le monde domestique, les lieux de mémoire et une nature paisible, qui fait écho au formidable instinct de survie de la résistante. Apparaissent aussi en transparence des extraits d’une correspondance qui précisent peu à peu la relation de la réalisatrice à la protagoniste, écrites par celle qui est le point de jonction entre les deux femmes – petite-fille de l’une, compagne de l’autre. Le cheminement parallèle des trois personnages, sur plusieurs années et par-delà la mort, mène à une conclusion qui tombe sous le sens : il n’est pas nécessaire d’être héroïque pour être des Partisanes ; nous nous devons d’être des Partisanes.
Olivia Cooper-Hadjian
Marta Popivoda, née en 1982 en Serbie, est une réalisatrice, artiste vidéo et chercheuse qui vit à Berlin. Son travail s’intéresse aux tensions entre souvenir et histoire, entre corps collectifs et corps individuels, ainsi qu’entre l’idéologie et la vie quotidienne, en se focalisant notamment sur les potentialités antifascistes et féministes du projet socialiste yougoslave. Privilégiant la pratique collective dans le cinéma et la recherche, elle est membre du collectif TkH («Théorie en marche») depuis plusieurs années. Le premier documentaire de Popivoda, intitulé Yougoslavie, Comment l’idéologie a mû notre corps collectif, a été présenté à la 63e Berlinale et a été par la suite projeté à de nombreux festivals du film dans le monde.